Combe d'Arclusaz
Longue randonnée en raquettes dans le brouillard, quelques secondes de grâce
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Novembre 2023
J'intuite la fin d'un cycle. J'ai l'élan de densifier cela à travers une série photographique. Amusant de résumer dix-huit années de vie en huit images ! Mais cela me semble bien, pour témoigner de ce cycle-là.
Longue randonnée en raquettes dans le brouillard, quelques secondes de grâce
Un matin, vraisemblablement sur la route du boulot
*(Intentional Camera Movement = "bougé désiré")
Je suis en confort avec l'inconfort, ou alors j'y travaille... Le texte qui suit parle de cet inconfort. Il parle des épreuves de la Vie et de la posture que je cultive. C'est un texte très personnel, pas très joyeux... a priori.
Nous sommes venus nous installer en Savoie en 2005 avec ma compagne. J'avais soif de montagne. Soif de minéral, de neige, de verticalité et de liberté. Nous avons tranquillement appris à évoluer dans cet environnement exigeant. Et sommes parvenus à une certaine autonomie en escalade, alpinisme, ski de randonnée — un niveau très modeste, tout juste suffisant pour apprécier les réalisations des autres.
En montagne, je me suis toujours senti toléré, rarement bienvenu. Et en même temps, ma joie d'y être est intense, au point de me surprendre à répéter lorsque j'y suis : "pourquoi pas plus souvent ?"
Un enfant est venu, puis un second…
Mon temps pour la montagne a fondu comme neige au soleil,
Tout comme ma condition physique…
Est-ce un choix ? Est-ce un renoncement ? C'est comme ça.
Reste la connaissance que mes propres limites résident dans mon mental. Je m'en sers pour quelques rares et longues bambées au départ de la maison. L'Arclusaz par exemple, en traversée via le col d'Arclusaz — oui par la falaise : ça passe.
Deux enfants…
Qui me regardent tels deux miroirs, et me révèlent…
… Une autre montagne, plus exigeante encore que celle que je renonce à pratiquer :
La Somme de mes Croyances.
C'est à la fois tellement propice au fourvoiement, tellement vertigineux, et tellement pourri : les protections ne valent rien, la chute est proscrite.
Et je chute, régulièrement.
Grimper.
Chuter.
Cela semble être un jeu.
Je n'y comprends rien. Découvrir les règles, peut-être ? Aucune certitude.
Une intuition, salutaire : mettre ma montagne en doute, la déconstruire.
Je m'y emploie, patiemment, laborieusement. C'est aussi douloureux que savoureux. Est-ce un choix ? Est-ce un renoncement ? C'est comme ça.
Ma montagne s'érode, elle se révèle creuse.
J'y grimpe toujours (la Vie !),
Je chute toujours (la Vie aussi !),
Mais le jeu a changé. Mon regard à changé.
Les chutes ne sont plus redoutées.
Les vieux réflexes ne sont que de vieux réflexes.
Le regard a changé, et les vieux réflexes sont vus.
Et le regard s'en amuse.
Et ma montagne s'use.
Bientôt la montagne est pleine de vide et je n'y crois plus.
Le regard à changé, le monde a changé.
Je me surprends à chercher quelle est la proposition, mais c'est un vieux réflexe…
Maintenant je sais — dans mes tripes — qu'il n'y a pas de projet.
Il n'y a que maintenant, et l'expérience d'y être.
Et depuis cette Connaissance,
s'il y a toujours ma montagne,
J'ai aujourd'hui loisir — lorsque le temps le permet,
De la parcourir sans souffrance,
Du sol au ciel et dans l'autre sens.