En montagne

Novembre 2023
Souvenirs d'en haut.

Retour au début

J'avais imaginé parcourir mon stock de photos, sélectionner quelques images intéressantes et les partager simplement. Mais il s'est passé autre chose.
Il s'est passé que ça m'a remué émotionnellement, vraiment fort. J'ai cherché à voir ce qui se jouait. Je partage cela aussi, du coup subséquemment.

J'ai fait un peu de montagne, en couple. Nous avons progressé ensemble, acquis de l'autonomie, créé quelques beaux souvenirs.
Puis nous avons fait deux enfants.
J'ai persévéré quelques années avec des copains-papa-aussi. Et puis plus grand chose. J'ai fait le choix d'être disponible, même si ça n'a pas toujours été une réussite.
Ça a le goût d'une fin, comme si mes expériences montagnardes ne pouvaient plus faire partie que du passé. Et une part de moi est très triste avec cela.

Écrivant cela, je suis bien conscient que ce n'est que mon expérience d'un instant.
Farfouiller dans mes souvenirs a simplement participé à l'émergence de l'idée que c'était terminé. Mais je ne suis pas obligé de cultiver cette idée, ni même de la croire !

Aussi, depuis l'époque des photos, il s'est invité quelque chose chez moi, que je vais nommer conscience écologique : je ne peux plus faire deux heures de voiture pour aller crapahuter quelque part – je ne fais plus ce genre de projet.
Et j'observe que si je ne suis pas seul dans cette démarche, je fais néanmoins partie d'une exception.
Du point de vue de ce qui se joue en moi (ça m'a pris quelques jours à détricoter) :

  • il y a de la colère, provoquée par la pression que nous continuons d'exercer, pour notre plaisir, sur l'espace naturel montagnard
  • il y a de la jalousie, dirigée vers ceux qui en profitent malgré tout – et cette jalousie-là j'ai bien du mal à la dispenser d'un (méchant) jugement
  • et il y a de la tristesse parce qu'être en colère, jaloux et jugeant ça me rend vraiment très triste.

Et je prendrai grand soin à laisser toutes ces émotions se déployer (naître puis mourir) dans mon espace intérieur, et me garderai bien de les nourrir ou de leur offrir un agir !

Ce que je trouve finalement intéressant, c'est de découvrir à quel point je suis focalisé sur quelque chose qui se termine, alors qu'autre chose émerge et réclame manifestement mon attention.
Ce que j'ai l'élan à terminer, c'est une relation à la montagne basée sur la performance et une certaine esthétique – le rêve d'alpinisme que j'ai cultivé à grands renforts de littérature héroïque et d'images photoshopées ?
Ce que j'ai l'élan à commencer, c'est une relation au sauvage basée sur la contemplation, le ressenti, la symbiose.

Achèvement et commencement.
Entre les deux, l'espace d'un instant : rien.
Il faudra pourtant bien le faire, ce pas !

On perd souvent plus d’énergie à avoir peur qu'à essayer.
― Stéphanie Bodet

En guise de conclusion, je vous confierai que cette dynamique de cécité + résistance au changement est bien plus globale que cette anecdotique histoire de pratique de la montagne.
Et pour le coup, je suis tenté de me sentir moins seul ;-)

Retour au début